Un messie nommé Perse
Un messie nommé Perse
Le récit d’Emmaüs, dont seul Luc fait état, ne semble présenter aucune trace d’une quelconque élaboration midrashique. Pourtant, aussi étrange que cela puisse paraître, nous allons voir que ce passage traite essentiellement de la Perse.
Dans ce récit, les deux disciples sont déçus : ils attendaient, selon la tradition, un messie qui libérerait Israël de la domination des Empires, selon ce qu’avaient prédit les Prophètes.
Lc 24.13 – Et voici que, ce même jour, deux d’entre eux faisaient route vers un village du nom d’Emmaüs, distant de Jérusalem de soixante stades, 24.14 – et ils conversaient entre eux de tout ce qui était arrivé. 24.15 – Et il advint, comme ils conversaient et discutaient ensemble, que Jésus en personne s’approcha, et il faisait route avec eux ; 24.16 – mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. 24.17 – Il leur dit : » Quels sont donc ces propos que vous échangez en marchant ? » Et ils s’arrêtèrent, le visage sombre. 24.18 – Prenant la parole, l’un d’eux, nommé Cléophas, lui dit : » Tu es bien le seul habitant de Jérusalem à ignorer ce qui y est arrivé ces jours-ci ! » – 24.19 – » Quoi donc ? » leur dit-il. Ils lui dirent : » Ce qui concerne Jésus le Nazarénien, qui s’est montré un prophète puissant en œuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, 24.20 – comment nos grands prêtres et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort et l’ont crucifié. 24.21 – Nous espérions, nous, que c’était lui qui allait délivrer Israël ; mais avec tout cela, voilà le troisième jour depuis que ces choses sont arrivées !
Le scénario messianique, tel qu’il se présente dans les Évangiles, semble donc incomplet : Rome n’a pas été détruite. Il y a donc un écart apparent par rapport aux textes prophétiques. De plus, la mort du messie et sa résurrection ne sont pas clairement lisibles dans la tradition juive. Autrement dit, les disciples s’interrogent sur cet écart et doutent : Où est le messie politique annoncé ? Faut-il attendre un nouveau messie ? Pour répondre à cette interrogation, il faut donc leur montrer que les prophètes avaient bien prévu la venue du messie telle que le midrash chrétien la présente. Cette démonstration prend beaucoup de temps, puisqu’il faut dérouler à nouveau l’ensemble des textes prophétiques. Cette démonstration ne nous est malheureusement pas parvenue, on nous dit seulement : il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait. Ce n’est pourtant pas cette longue explication de Jésus qui provoque l’illumination des disciples, mais un geste bien précis de ce dernier : la fraction du pain.
24.25 – Alors il leur dit : » O cœurs sans intelligence, lents à croire à tout ce qu’ont annoncé les Prophètes ! 24.26 – Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire ? » 24.27 – Et, commençant par Moïse et parcourant tous les Prophètes, il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait. 24.28 – Quand ils furent près du village où ils se rendaient, il fit semblant d’aller plus loin. 24.29 – Mais ils le pressèrent en disant : » Reste avec nous, car le soir tombe et le jour déjà touche à son terme. » Il entra donc pour rester avec eux. 24.30 – Et il advint, comme il était à table avec eux, qu’il prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et le leur donna. 24,31 – Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent…
La suite du récit, en Luc 24,35, nous le confirme :
Et eux de raconter… comment ils l’avaient reconnu à la fraction du pain.
La fraction du pain serait donc le signe évident, la manifestation publique de la venue du vrai messie. La fraction du pain signifie en effet le partage de la Loi entre tous les peuples, en même temps que son allégement. Le grec klasei tou artou serait ici la traduction de l’hébreu paras leHem : le partage ou la fraction du pain. LeHem, c’est en hébreu le pain, mais en araméen, c’est le festin (Dn 5, 1) si bien que paras leHem signifie aussi la participation au festin (eschatologique). Ce verbe paras qui signifie partager et étendre a été choisi à cause de sa valence messianique (52). En Rm 16, 12 on trouve une femme nommée Perse. paras en hébreu est en effet aussi la Perse. La Perse n’a, bien entendu, rien à voir avec l’idée de messie. À ceci près que Cyrus, roi de Perse, est dit être le messie de Dieu.
Ainsi parle Yahvé à son messie, à Cyrus dont j’ai saisi la main droite, pour faire plier devant lui les nations et désarmer les rois… pour que les portes ne soient plus fermées (Is 45,1)
Le texte massorétique va même jusqu’à écrire par deux fois le nom de Cyrus de manière défective (sans le vav) simplement pour qu’il puisse prendre la valence messianique (qoresh = 52), c’est le cas dans les deux premiers versets du livre d’Ezra. Dans le Talmud (traité yoma 10a par exemple) on discute du choc des Empires, seule chance de salut pour les Juifs ; la question est de savoir si Rome sera vaincue par la Perse ou si, à l’inverse, la Perse vaincra Rome. Les Perses y sont dits avoir construit le Temple (permis sa reconstruction).
Plus loin, dans notre péricope, on demande aux disciples : demeurez (hoHilu) dans la ville jusqu’à ce que vous soyez revêtus de la force d’en-haut. La peshitta rend cette force d’en haut par Hayila min roma. Ce qui peut se lire : la force de Rome. Comme la ville (‘ir) est aussi la colère, on peut se demander si ce passage n’est pas à double entente. Le sens de ce passage serait alors une réponse à la déception des disciples : paras (le messie/la Perse) vaincra Rome tout comme la Perse avait déjà renversé Nabuchodonosor.
Nous tenons donc un rapport, minimal, entre le messie et la Perse : tous deux ne sont que des instruments aux mains de Dieu pour renverser les Empires. Le mot paras est aussi utilisé ici, car de nombreux banquets de la Bible se situent en Perse (Assuérus, Balthazar…). En Daniel, précisément, et dans le récit du festin de Balthazar, une main surnaturelle écrit sur le mur le mot paras, qui signifie ici (en araméen) division, ce qui pourrait être une des déterminations de Luc 12,51 : Pensez-vous que je sois apparu pour établir la paix (shalom = 52) sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien la division (paras = 52). De même : tout royaume divisé contre lui-même, etc..
Dans cette péricope d’Emmaüs, ce sont bien d’autres jeux phonétiques autour de paras qui sont exploités. En effet parsam en hébreu d’emprunt est la manifestation publique, c’est pourquoi d’ailleurs, dans le récit de la passion, le messie reçoit les insignes (grec : parasema) de la royauté.
Cette relation est attestée en Gn Rabba 65,1 :
Moïse… a divulgué (pirsem) la perfidie de Rome… lorsqu’il dit : (impur le porc) parce que, malgré le sabot fourchu (mapris parsa)… (Lv 11,7)
Une autre exploitation est ici plus discrète, celle de parsa comme unité de distance (et donc aussi de temps) empruntée aux Perses. C’est la distance qu’on peut parcourir à pied en un jour (parasange). Elle apparaît au début de la péricope, lorsqu’on nous explique qu’Emmaüs est située à 60 parasanges de Jérusalem.
Lc 24.32 – Et ils se dirent l’un à l’autre : » Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Écritures ? » 24.33 – A cette heure même, ils partirent et s’en retournèrent à Jérusalem. Ils trouvèrent réunis les Onze et leurs compagnons, 24.34 – qui dirent : » C’est bien vrai ! le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon ! » 24.35 – Et eux de raconter ce qui s’était passé en chemin, et comment ils l’avaient reconnu à la fraction du pain.
Le récit semble ici dédoublé. On retrouve l’opposition paras/shalom. Mais alors que le terme paras (52) servait plus haut de signe de reconnaissance (puisque les disciples reconnaissaient Jésus à ce terme de fraction) ici, c’est le terme de paix (shalom = 52) qui va constituer un motif de trouble, de crainte, de non-reconnaissance.
24.36 – Tandis qu’ils disaient cela, lui se tint au milieu d’eux et leur dit : » Paix à vous ! » 24.37 – Saisis de frayeur et de crainte, ils pensaient voir un esprit. 24.38 – Mais il leur dit : » Pourquoi tout ce trouble, et pourquoi des doutes montent-ils en votre cœur ? 24.39 – Voyez mes mains et mes pieds ; c’est bien moi ! Palpez-moi et rendez-vous compte qu’un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai. » 24.40 – Ayant dit cela, il leur montra ses mains et ses pieds. 24.41 – Et comme, dans leur joie, ils ne croyaient pas encore et demeuraient saisis d’étonnement, il leur dit : » Avez-vous ici quelque chose à manger ? 24.42 – Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé. 24.43 – Il le prit et le mangea devant eux.
À nouveau, est repris ici le thème du repas eschatologique, toujours accompagné comme dans le seder de pessaH, de récit midrashique, de hagada.
24,44 – Puis il leur dit : Telles sont bien les paroles que je vous ai dites quand j’étais encore avec vous : il faut que s’accomplisse tout ce qui est écrit de moi dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes. – Alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Écritures, – et il leur dit : Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, – et qu’en son Nom le repentir en vue de la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem.
À nouveau, il faut dérouler tout le midrash messianique pour montrer que toutes les prophéties sont accomplies, dès lors que la loi est fractionnée et dispersée, c’est le cas de le dire, entre toutes les nations. Or, pour montrer que cette prophétie est bien accomplie, Jésus fait référence à quelque chose qui ne semble pas avoir un rapport direct avec ce partage de la Loi. À deux reprises, il doit expliquer aux disciples que la souffrance du messie et sa résurrection sont la même chose que ce partage de la loi. Or, seul le geste de la fraction du pain (leHem) leur ouvre les yeux. Les disciples semblent donc comprendre qu’il existe un rapport entre cette souffrance (pathein traduit sans doute l’hébreu Hemla) et ce leHem (pain et guerre) qui en est l’anagramme. (De même que maHal : souffrance, et Hamal : être épargné). Le sens de ce passage comme nouvelle donation de la loi ressort également du verset 24, 32.
Et ils se dirent l’un à l’autre : Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Écritures ?
La loi brûle (bo’er) comme au Sinaï, mais elle est désormais intérieure pour accomplir la prophétie de Jérémie (au-dedans de nous). Plusieurs passages midrashiques font état d’un feu qui environne les Docteurs lorsqu’ils relient entre eux les versets du Pentateuque avec ceux des Prophètes, et ceux-ci avec les ketubim, comme le fait ici le messie. Le fait que le messie soit apparu à Simon (celui qui entend) renvoie aussi à l’audition du Sinaï.
24.48 – De cela vous êtes témoins. 24.49 – Et voici que moi, je vais envoyer sur vous ce que mon Père a promis. Vous donc, demeurez dans la ville jusqu’à ce que vous soyez revêtus de la force d’en-haut. 24.50 – Puis il les emmena jusque vers Béthanie et, levant les mains, il les bénit. 24.51 – Et il advint, comme il les bénissait, qu’il se sépara d’eux et fut emporté au ciel. 24.52 – Pour eux, s’étant prosternés devant lui, ils retournèrent à Jérusalem en grande joie, 24.53 – et ils étaient constamment dans le Temple à bénir Dieu.
Si Jésus montre ses mains et ses pieds c’est d’abord pour accomplir Ps 22, 17 (…pour percer mes mains et mes pieds), mais ces pieds ont-ils un rapport avec le terme paras ?
24.39 – Voyez mes mains et mes pieds ; c’est bien moi ! Palpez-moi et rendez-vous compte qu’un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai. Ayant dit cela, il leur montra ses mains et ses pieds.
Le Midrash Rabba parvient, pour sa part, à établir un lien entre les termes paras et pieds, pour une raison simple, c’est que parsa est aussi, dans la Bible, le sabot d’un animal, si bien qu’on lit par exemple en Ct Rabba 8,13 : si tu voix un cheval perse (sus parsi)… surveille l’arrivée (les pieds) du messie. Il semble que le cheval soit ici une métaphore du pouvoir politique puisque le dictionnaire Jastrow p. 967 nous apprend que sus est aussi l’éclat. Si bien que la phrase de Ct Rabba signifierait : si tu vois l’éclat de la Perse, scrute les pieds du messie. On trouve ici l’idée de possible duplicité quant au critère de reconnaissance du vrai messie. Celui-ci se reconnaît à ses pieds (Voyez mes mains et mes pieds). Encore faut-il vérifier qu’il s’agit du vrai messie et non d’un faux. Il y faut donc un critère, comme pour ce qui est de reconnaître les animaux autorisés (cacher = 52) à leur sabot fendu (parsa). On serait dans un contexte polémique. Comment reconnaître le véritable Agneau ? Lm Rabba reprend le même thème en rapprochant le mot paras (Perse) de la notion de piège tendu (parash) sous les pas du messie. Le dictionnaire Jastrow nous apprend que paras et parash sont quasiment des termes interchangeables. Or la racine parash possède d’autres sens qui sont ici utilisés : expliquer (Jésus leur explique le sens des Écritures), séparer (Jésus se sépare d’eux).
Quant au sens de ses mains, il est également surdéterminé : il résulte de la caractérisation de la main comme loi et comme médiation. La main signifie aussi la puissance.
Le nom d’Emmaüs a peut-être été choisi pour faire jeu de sens avec le verbe hébraïque emas, méconnaître (Jb 31, 13) or les disciples ne reconnaissent pas le messie. Aller vers Emmaüs, c’est aller vers un kefar, un village, mais aussi un reniement (kopher). En Actes 1,4 Jésus avait enjoint à ses disciples de ne pas s’éloigner de Jérusalem, mais d’y attendre ce que le Père avait promis. Or, ici, ils s’éloignent de Jérusalem en allant vers Emmaüs. Comme dans les Actes, les disciples se demandent : Seigneur, est-ce maintenant, le temps où tu vas restaurer la royauté en Israël ? (Ac 1,6) et se voient promettre une force. Les Encyclopédies pensent qu’Emmaüs serait une déformation de Hamat (ville d’eaux chaudes, et de cures thermales). Dans ce cas, le sens du passage serait une mise en scène de l‘exil, du départ de Jérusalem vers l’exil (la colère, Hama) suivi du retour à Jérusalem. C’est ainsi qu’un midrash accomplit les Écritures.
Notre passage joue aussi sur les sens de la série qbr/qrb/bqr. Le tombeau (qbr) trouvé vide au matin (bqr) fait écho au feu du qrb (au-dedans de nous) et à la proximité de la venue messianique. Les femmes ne trouvent nul corps (basar) ou nulle annonce (besora) dans le tombeau. D’où le risque de vacuité et de renoncement (bqr) à quoi doit remédier le midrash accomplissant (accomplir, c’est en hébreu remplir).
Notons enfin que Qohélet Rabba, midrash sur l’Ecclésiaste, rapporte en 7,15 cette curieuse histoire d’un certain Eléazar ben ‘Arakh, qualifié de source jaillissante, qui oublie toute sa Tora pour s’être séparé de ses collègues afin de résider à Emmaüs.
Voici ce passage :
R. YoHanan b. Zakaï avait cinq disciples, et tant qu’il vécut, ils se tinrent assis à ses pieds. Lorsqu’il mourut, ils se rendirent à Yabné. R. Eléazar b. ‘Arakh, pour sa part, alla rejoindre sa femme à Emmaüs, ville où l’eau était bienfaisante et qui avait bel aspect. Il attendit que ses collègues viennent l’y retrouver, mais en vain. Comme ils ne venaient pas, il voulut se rendre chez eux, mais sa femme l’en dissuada. Elle dit : Qui a (le plus) besoin de qui ? Il répondit : C’est eux qui ont besoin de moi. Elle lui dit : Soit un garde-manger (Hamat) et des souris (‘akvarim) ; qui va vers qui ? Sont-ce les souris qui vont au récipient ou est-ce le récipient qui va aux souris ? Il l’écouta et demeura sur place jusqu’à ce qu’il oublie son savoir.
Hamat est donc un autre nom d’Emmaüs. Il existe une autre ville de Galillée dont le nom est proche de ‘akvarim (les souris). Or nous retrouvons ici ce jeu d’oppositions entre le garde-manger et les souris. Les disciples, chez Luc, semblent aussi oublier leur savoir en se séparant des Onze. Ce passage serait donc en relation avec les divergences entre les disciples après la mort du messie.
Il n’existe aucun rapport apparent entre l’épisode de ben ‘Arakh et le dilemme politique des disciples de Luc. Sauf que la première narration est censée expliquer Qo 7,7 : MAIS L’OPPRESSION (‘osheq) TROUBLE LE SAGE.
Et le midrash d’interpréter ‘osheq par ‘oseq : c’est-à-dire la controverse dans laquelle les disciples des sages se lancent (‘osqin) les uns contre les autres. Enfin, il existe un thème récurrent dans le midrash juif: l’importance trop grande donnée à la politique et aux affaires publiques éloigne de la Tora.
La suite du verset de l’Ecclésiaste et son commentaire midrashique nous le confirme :
ET UN PRÉSENT DÉTRUIT LE DISCERNEMENT : R. Yehoshu’a b. Lévi a dit : J’ai appris de Yéhuda b. Pedaya quatre-vingts halakhot concernant un tombeau dont la terre a été retournée, mais absorbé que j’étais par les besoins de la communauté, je les ai oubliés.
Voilà sans doute pourquoi les disciples d’Emmaüs ne devraient pas trop s’inquiéter du messie politique.
La scénarisation de l’épisode d’Emmaüs dans Luc est inhabituelle et semble contredire l’hypothèse midrashique. En effet, qu’un récit sur Jésus puisse être caractérisé de midrash, voila qui peut sembler plausible. Mais un récit où Jésus fait un midrash sur lui-même donne plutôt une impression d’historicité. Pourtant, ce type d’autoréférence n’est pas inconnu du midrash, ni même de la Bible. En voici un exemple. Dans l’épisode de la magicienne d’En Dor, celle-ci reconnaît que l’esprit qu’elle invoque est Samuel à cause de son manteau. Effectivement, en 1S 1,19 l’Écriture rapporte que la mère de Samuel lui avait confectionné un manteau. Mais comment la nécromancienne savait-elle cela ? La réponse est toute simple : la magicienne est sortie du chapitre 28 du livre de Samuel, elle s’est emparée d’une Bible, elle a ouvert le premier chapitre du livre de Samuel et là, elle a lu l’histoire du manteau, ce qui lui a permis de le reconnaître.
Texte extrait de l’ouvrage « Comprendre les origines du Christianisme » de Maurice MERGUI