Dictionnaire midrashique 1
Dictionnaire midrashique 1
• Levain (ou levure) : Ingrédient qui prétend “ajouter” au pain divin (la loi) avec pour seul effet de l’alourdir, et de produire gonflement et enflure. De ce fait, la loi humaine durcit vite, alors que la loi divine, sans ajout (sans levain, donc azyme), se conserve plus longtemps. La conclusion du midrash chrétien pourrait être en quelque sorte : la loi lourde (au levain) nous gonfle.
• Nourriture, mets : La Loi. Exemple : Quelques jours plus tard, le maître fit un banquet et il envoya du banquet beaucoup de mets à cet esclave (Hermas 55,9)
• Blé : Loi non transformée par l’homme, et donc peu susceptible d’être trafiquée. Les disciples de Jésus préfèrent ce type de loi légère, à celle des Pharisiens qui, selon eux, a subi trop d’ajouts (de levain). Le sens d’argent est très récent et n’est pas attesté dans le midrash. Exemple peu connu : Une fois rassasiés, on se mit à alléger le navire en jetant le •blé à la • mer (Ac 27, 38)
• Vin : Autre symbole de la Loi. Le vin en effet réjouit le cœur de l’homme. La capacité étonnante du vin à se conserver sur de longues périodes a impressionné le Judaïsme ancien préoccupé par le problème de la conservation de la loi. L’observant se définit en effet comme celui qui garde en dépôt (shomer) la Loi.
• Repas : Absorption de la Loi. Il débute par un rituel de réception de la Loi (le lavage des mains n’a rien à voir avec l’hygiène, il s’agit de recueillir l’eau (la loi) dans ses mains) et se termine par une prière de remerciement pour avoir bénéficié du don de la nourriture (la loi).
• Voile : tout ce qui empêche de distinguer le vrai Dieu. Attribut de la honte liée à l’idolâtrie.
• Ombre : élément à deux valeurs. Soit on s’abrite à l’ombre (tsel) de Dieu, et on est sauvé (hébreu : hetsel). Soit on reste païen, et donc à l’ombre de la mort (tsalmavet). C’est pourquoi Pierre, dans les Actes (Ac 5,15), n’a besoin pour guérir les païens que d’un peu d’ombre. En effet, le midrash a mis à jour une propriété inattendue de l’ombre : elle permet de se prémunir contre les effets nocifs du (culte du) soleil (Hama) et donc de la colère divine (Hema) qui s’ensuit.
• Sable : profane, non sacré. Cette équivalence provient de ce que Hol en hébreu signifie à la fois sable et profane. D’où les paraboles opposant ce qui est construit sur du sable à ce qui est construit sur le roc (Mt 7,26).
• Mer : les nations païennes. Exemple : quatre bêtes énormes sortirent de la mer (Dn 11, 45).
• Poissons : habitants de la mer. Exemple : les Juifs dispensent la loi parmi les Nations. Bien que cela paraisse peine perdue, ils en seront récompensés à la fin des temps. QoR 11,1 : On raconte qu’un homme prenait tous les jours du pain qu’il allait jeter en pleine mer. Un jour, il alla acheter un poisson ; en l’ouvrant, il trouva un objet de valeur. Les gens dirent de lui : C’est l’homme à qui son pain fut fort utile, et on lui appliqua ce verset : lance ton pain sur l’eau.
• Nudité : absence du vêtement de la loi.
• Honte : sentiment proche de la culpabilité et lié à l’idolâtrie. Exemple : avant de commettre leur faute, Adam et Ève n’avaient pas honte de leur •nudité.
• Allégement de la loi. Selon l’eschatologie juive, la Loi actuellement lourde, sera allégée à la fin des temps (par partage avec les païens). Cette conception qui ne manque pas d’humour est reprise par le midrash chrétien. Exemple : voir •Blé.
• Assemblée : (hébreu qahal, qehila). Instance qui, à la fin des Temps intervient pour inverser la dispersion et l’exil, et pour signifier le temps du Rassemblement (des exilés, mais aussi de l’ensemble des peuples). Qahal a été traduit en grec par ecclesia, qui a donné le mot Église.
• Tour. Symbole de la révolte et de l’orgueil avant la venue du messie. Après sa venue, le symbole s’inverse et désigne l’Assemblée.
• Marcher : suivre la halakha. Exemples : marchez comme les enfants de la lumière (Ep 5,8) C’est dans le Christ qu’il faut marcher (Col 2,6).
• Hydropique : Personne souffrant d’une maladie consistant en une accumulation d’eau dans le corps (lire : trop de loi dans la doctrine). Il s’agit donc des Juifs alors que les paralytiques sont en général païens.
• Paralytique : Personne qui ne peut marcher car il ne dispose pas de la halakha. Il s’agit donc des Païens.
• Morts : païens. Exemples : Vous qui étiez morts du fait de vos fautes et de votre chair incirconcise (Col 2,13). Les morts renvoient aux impies qui, même lorsqu’ils sont en vie, sont appelés morts (QoR 9,4). Un païen ne meurt pas car il n’a jamais vécu pour pouvoir mourir (Évangile de Philippe 3a )
• Fils : Terme technique signifiant messie et utilisé comme équivalent de ce terme à cause de sa valeur numérique identique (52). Abraham a été ainsi le premier homme à croire à la promesse d’un fils. Fils de Dieu signifie donc messie de Dieu (oint par Dieu).
• Paix : messie. Cette équivalence résulte également des valeurs numériques des deux termes : 52. Le commentaire ba’al haturim (section bamidbar) précise : shalom begematria zehu mashiaH (la valence de paix est celle de messie). Exemples : Ps 29,11 : Dieu bénira son peuple par la paix. Za 8, 12: car la paix est en germe, etc. Mardochée, à la fin d’Esther, annonce la paix à toute sa descendance, etc.
• Perse : agent de l’eschatologie du fait qu’elle est vouée à abattre la puissance de Rome.
• 52 : Une des valences du mot mashiaH (messie), une autre étant 358. Cette valence explique la présence dans les Évangiles de termes équivalents tels que : ben (fils), ashré (bienheureux), Eliyahu (Élie), netser (surgeon, gardien), shalom (paix), sheqel (sicle), YoHanan (Jean) gulgolet (crâne, tête). C’est ce qui explique aussi que Matthieu commence son texte par sefer (livre), que le mont où Jésus est livré ne soit pas n’importe quelle colline mais le mont des oliviers (zeytim, 52), que Jésus reçoive des coups (makot, 52), que les pans (canfe, 52) de son vêtement aient une certaine importance, etc. Est-ce cette valeur qui explique que Paul s’exprime par épîtres (igrot, 52, des Épîtres) ? La valeur réduite de 52 étant 7, bien d’autres termes ayant cette valeur interviennent dans la fabrication des narrations évangéliques. Notons enfin que le tétragramme a une valence de 52 lorsqu’il est écrit en plérôme (ywd + hh + ww + hh).
• Ressuscité : guéri de l’idolâtrie. Exemple: Du moment donc que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les choses d’en haut (Col 3,1).
• Sceau : (grec sphragis et hébreu tardif : sphargis). Nom de Dieu et sa signature. Dieu parle par ses écrits, et sa parole vaut engagement, il a donc un sceau et signe de son nom. La promesse essentielle des Écritures étant la promesse d’un fils, sa venue est le sceau des Écritures.
• Vêtement : Loi. Ce terme peut aussi dans le midrash, signifier Temple. Dès le début du Midrash Rabba sur la Genèse on nous explique que le terme « amon » qui sonne comme « émunim » (croyants) signifie « enveloppé ». La loi enveloppe le croyant comme un habit de prière. Exemples : Lors donc que nous avons nourriture et vêtement, sachons être satisfaits (1Tm 6,8). En venant, apporte le vêtement que j’ai laissé à Troas chez Carpos, ainsi que les livres, surtout les parchemins (2Tm 4, 13). Ce terme peut aussi évoquer la trahison et l’abandon de la loi à cause d’un autre sens de la racine bgd. D’où le thème de l’abandon des vêtements dans les Évangiles et les Actes.
• Clé : Le code du midrash ne s’applique pas mécaniquement. Il dépend du contexte. Parfois, sommeil signifie vraiment sommeil, et non Exil. Avantage : cela oblige le lecteur à rester toujours vigilant.
• Eau : Parole de Dieu, loi, justice. L’eau est parfois dispensée sous forme de pluie. Ce terme est parfois rendu par le terme moré, qui sonne comme moré (maître). Jl 2, 23 parlant de « pluie de justice », on a là, probablement, l’origine du fameux “Maître de Justice” personnage eschatologique que les qumranologues croient historique.
• Baptiser : Convertir un sujet par immersion totale dans la Loi. La tebila fait partie du rituel juif de la conversion. En hébreu tardif, la racine tbl, (tet, bet, lamed) signifie immerger, purifier, rendre consommable (par prélèvement de la dîme) tandis que la racine proche tbl (tav, bet, lamed) a le sens d’épicer ou de bonifier le vin. On peut donc baptiser (convertir) quelqu’un soit en le plongeant dans l’eau, soit en lui fournissant du bon vin (une loi agréable et légère).
• Soleil : Temps messianiques. Équivalents : matin, aube, lumière, jour. Les première représentations chrétiennes connaissent un Christ-Hélios qui n’a donc rien de païen.
• Chien : Païen (à cause de l’incirconcision flagrante). Exemple : dans Tobie, un chien suit Tobie et l’Ange. Un mort peut aussi évoquer un païen. D’où l’équation : conversion = résurrection.
• Bêtes : Idolâtres. Référence : les serviteurs des étoiles sont appelés bêtes ‘ovde kokhavim keruyim behema (Qohélet Rabba 3,21). Les premières représentations chrétiennes montrent un Christ parlant aux animaux, appelé Christ-Orphée.
• Animaux : Les païens. (voir Bêtes). Le Judaïsme a développé une doctrine sur l’attitude à adopter envers les animaux. L’attitude des Juifs envers eux ne doit pas être cruelle. Il faut par exemple délester un âne fatigué par une charge trop lourde. Dieu, en effet, a béni les animaux (Gn 1,22). Et parfois, il intervient même pour les sauver. L’animal peut à la limite être rapproché (leqarev). Néanmoins, il faut garder une certaine distance, et bien entendu éviter les relations sexuelles avec eux. Référence principale : Ninive contenait… une foule d’animaux (Jon 4,11)
• Sacrifice : rituel étrange qui consiste apparemment à rapprocher (racine qrb) un paiën ou un animal (voir : animaux).
• Petit : Adjectif utilisé concurremment aux termes précédents pour parler des païens. On trouve aussi la forme “petits chiens” (Mt 15, 27) au cas où le lecteur n’aurait pas bien saisi.
• Prostitution (porneia) : paganisme. En Ac 15, 19 on décide de ne pas tracasser les païens qui se convertissent, on leur demande seulement d’abandonner leur porneia.
• Porte : Conversion. Le midrash a réussi à dégager cette propriété technique et inattendue de la porte : seule la •Porte permet d’•Entrer. La table ou le banquet signifient aussi la conversion puisqu’on y partage le •Pain (la Loi).
• Rome : Dans le midrash juif, Rome peut parfois signifier Rome, ce qui est déjà remarquable. Dans le midrash chrétien, Rome signifie la ville hautaine, car son nom sonne comme rama (hauteur), elle désigne donc souvent Jérusalem. Pour la même raison, Babel (Babylone) peut désigner également Jérusalem.
• En esprit : Par midrash. Exemple : Sodome est identique à l’Égypte en esprit (Ap 11,8)
• Accomplir : Accomplir un texte est une opération qui nécessite une étroite coopération entre le rédacteur et le lecteur. Le rédacteur doit d’abord produire un texte qui traite d’événements devant se produire à la fin des temps. Le lecteur doit de son côté lire ces textes selon un seul des deux modes des verbes hébraïques : l’accompli.
• Cahier des charges : Le midrash produit du texte, pour une part, en partant du texte sacré qui est pour lui comme un cahier des charges. La raison d’être des détails les plus anodins doit donc être recherchée dans les Écritures. Exemple : Zacharie contient l’expression hine ish : voici un homme (Za 6,12) appliquée à un Josué. Pilate énoncera donc à propos d’un autre Josué : Voici un homme (Jn 19,5) phrase plus connue en latin : Ecce Homo. Qohelet Rabba rapporte qu’à la mort de Josué, les Israélites étaient tellement occupés à se partager le pays qu’ils ne rendirent pas les derniers honneurs à leur chef. Dieu fit alors trembler la montagne. On retrouvera donc, dans la Passion, ces thèmes de la terre qui tremble et du partage (des vêtements de Jésus)
• Josué : Dans l’eschatologie juive, l’Histoire se résume à deux périodes : l’exil et la fin de l’exil. Moïse est relié par le midrash chrétien à l’exil, puisqu’il n’entre pas. Josué, à l’inverse, est rattaché à la fin de l’exil puisqu’il établit les hébreux sur sa terre, c’est pourquoi il est, dans le midrash chrétien, la figure du messie et il lui donne son nom (Jésus).
• Main : Dans le midrash chrétien, la main peut signifier la loi de Moïse. Raison pour laquelle Jésus guérit les mains sèches. En effet, pour ce midrash, la loi de Moïse tend à se dessécher. De même, le pain auquel on a ajouté du levain tend à se durcir rapidement. Contrairement au pain azyme qui se conserve plus longtemps. Le midrash chrétien n’est pas un traité de boulangerie (bien que ce soit le sens de bet-leHem). Simplement, il se veut une réflexion sur la meilleure conservation possible de la Loi.
• Pauvres : Israël. Selon le midrash : chaque passage où il est question de pauvres, de misérables et de malheureux, c’est d’Israël que l’Écriture veut parler. D’où : Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous (Lc 6, 20) ou la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres (Mt 11, 5) Les pauvres, en effet, vous les aurez toujours, etc.
• Se parfumer : accomplir les commandements de la Tora. En échange on est pardonné, d’où l’épisode de la pécheresse pardonnée.
• Bienheureux : ceux qui accomplissent les commandements de la Tora. En effet le sens de ashré est celui de la marche, c’est-à-dire de la halakha. De là à traduire ashré par en marche, il n’y a qu’un pas.
• Tour : Symbole eschatologique. La première tour, celle de Babel était le symbole de la révolte contre Dieu. Elle fut punie par la dispersion, l’Exil, et de la confusion des langues. À la fin des temps, la seconde tour sera donc celle du rassemblement de la communauté, du Retour et du don des langues.
• Nuit : Exil. Période précédant la venue du messie.
• Retour : Fin de l’Exil, conversion (teshuva), Alliance définitive.
• Lune : messie. La lune éclaire en effet la nuit de l’exil.
• Phases ou veilles de la nuit : selon le midrash la nuit est divisée en trois phases ou trois veilles : celle du braiment de l’âne, celle de l’aboiement des chiens et, enfin, la conversation entre l’époux et l’épouse qui allaite son nourrisson. À vous de voir.
• Dispersion : Conséquence de la révolte contre Dieu. La dispersion s’accompagne de la multiplication des langues.
• Épreuve : Catégorie fondamentale de l’eschatologie juive, période succédant à la rupture de l’Alliance et précédant celle du messie. Autre nom de l’Exil. En raison de la phonétique hébraïque, l’épreuve est associée à l’élévation. En raison d’une métaphore métallurgique, l’Épreuve est aussi liée à la purification au sens de la purification des métaux.
• Comble : Catégorie fondamentale de l’eschatologie juive. Désigne l’apogée de l’épreuve, et donc le moment de la venue du messie.
•Inversion : Catégorie fondamentale de l’eschatologie juive. Cause et conséquence de la venue du messie. L’inversion généralisée de la loi provoquera l’inversion messianique.
• Sodome : comble de l’inversion et donc signe et figure de la fin des temps. C’est pourquoi dans la Bible, Sodome est toujours liée au renversement (hapekha) Exemples : Dt 29,22 ; Am 4, 11 ; Jr 50,40 ; Jr 49,18 ; Lm 4, 6.
• Dix : Figure de la catégorie du comble. Exemple : Le midrash affirme que le monde est destiné à connaître dix famines, dont la dernière se produira à l’époque du messie.
• Passion : Épreuve, souffrance. À partir du 17e siècle signifie coup de foudre.
• Renvoi : Dispersion de la foule après qu’elle a été nourrie. Ce thème a donné son nom à la messe (ite, missa est).
• Pêche : activité qui consiste à inverser la période de la dispersion en rassemblant dans un filet, l’ensemble des êtres humains. Cette activité se produit d’elle-même à la fin des temps.
• Vigne : Zone d’action du divin. Assez étendue dans le Judaïsme. Exemple : Jézabel s’oppose aux prophètes (nebiim) à propos de la vigne (de nabot).
• Glaive : Parole divine. Le glaive étant plus redoutable lorsqu’il est à double tranchant, cette parole a deux bouches.
• Chair : (hébreu bassar) : incarnation de la bonne nouvelle (bessora) dans le messie.
• Saints : statut de ceux qui constituent le reste d’Israël à la fin des temps.
• Proches : Juifs ou païens en voie de conversion.
• Lointains : païens non encore convertis. Ex : Car c’est pour vous qu’est la promesse, ainsi que pour vos enfants et pour tous ceux qui sont au loin, en aussi grand nombre que le Seigneur notre Dieu les appellera (Ac 2, 39).
• Colère : Exil, période précédant l’arrivée du messie.
• Condensation : fusion de plusieurs idées midrashiques dans une seule. Exemple : lorsque Jésus nous apprend que Hérode est un renard, il fait usage de la condensation. Quelles sont les idées ici condensées ? Les Empires sont comparées à des bêtes terrifiantes. Mais il se trouve que l’Égypte a été vaincue sur la mer rouge. C’est donc le plus petit des Empires, le moins dangereux. Hérode, comme Pharaon, massacre les premiers-nés. Or, Pharaon est associé à la ruse, tout simplement en vertu du fait qu’il dit en Exode 1,10 : prenons de sages mesures (hava nitHakma lo : littéralement : soyons rusés contre lui). Pharaon est donc un rusé. Et, en conséquence, le Hérode évangélique (qui n’a rien à voir avec le Hérode historique, mais est ici un personnage purement midrashique, de la même classe que Pharaon) hérite de cet attribut, et devient donc un renard.
Exode Rabba (22,1) : L’Écriture compare les Empires étrangers à des bêtes sauvages, ainsi qu’il est écrit : quatre bêtes énormes sortirent de la mer (Dn 7, 3). Or lorsque l’Écriture compare les Égyptiens à une bête sauvage, c’est à des renards qu’elle les compare. De même en effet que le renard est la plus petite de ces quatre bêtes sauvages, de même les Égyptiens exercèrent la plus petite des dominations, ainsi qu’il est écrit : L’Égypte sera le plus modeste des royaumes (Ez 29, 15).
• Promesse : Annonce prophétique de la venue du messie. Toute promesse de concevoir un fils dans les Écritures est lue comme annonce de la venue du messie. Antérieure au don de la Loi, la promesse est donc supérieure à la Loi. En hébreu, cette promesse est simplement la bonne parole de Dieu, le davar.
• Contradiction : le midrash chrétien comme le midrash juif ne connaissent pas la contradiction. Ils juxtaposent des élaborations différentes les unes à côté des autres, sans considération de contradictions éventuelles. Ainsi, la naissance charnelle du Christ semble être en contradiction avec les passages où son origine céleste, non terrestre, est proclamée. La résurrection doit-elle être tenue pour charnelle et pour future ? Ou est-elle seulement spirituelle, mystique, déjà accomplie dans le chrétien ? 2Tm 2,18 condamne ceux qui disent que la résurrection est déjà arrivée. Paul serait donc condamnable, car le fond de sa doctrine est que le chrétien est ressuscité dans le Christ.
• Chas d’une aiguille : porte étroite. Exemple : Ct R 5,3 Le Saint béni soit-il s’adressa ainsi à Israël : mes enfants me présentent une porte de repentir aussi grande que le chas d’une aiguille, mais moi je leur ferai une porte par laquelle pourront passer les chariots et les voitures.
• Sages : Le midrash juif enjoint d’obéir aux Sages plus qu’aux textes sacrés: De plus, il n’est pas dit : selon le jugement qu’il vous indiquera, mais, qu’ils vous indiqueront. Vous n’élèverez aucune objection contre leur décision : s’ils vous disent que la main droite est la main droite, et la main gauche, la main gauche, écoutez-les, et même s’ils vous disent que la main droite est la main gauche et la main droite, la main gauche. D’où cette reprise :
Mt 23,2 – Sur la chaire de Moïse se sont assis les scribes et les Pharisiens : 23,3 – faites donc et observez tout ce qu’ils pourront vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs actes : car ils disent et ne font pas.
• Divorce : Dissolution de l’acte de mariage. Il s’agit le plus souvent, dans le midrash, de la dissolution de l’Alliance entre Dieu et son peuple. Contrairement aux Pharisiens, Jésus rend cette rupture très difficile, voire impossible, sauf cas de prostitution notoire (lire : idolâtrie).
• Au coucher du soleil : à l’arrivée du messie (ke-bo ha-shemesh) Exemple : Au coucher du soleil, tous ceux qui avaient des malades atteints de maux divers les lui amenèrent, et lui, imposant les mains à chacun d’eux, il les guérissait (Lc 4, 40)
• Arc-en-ciel : signe de la fin du déluge, et donc début de l’alliance définitive entre Dieu et les hommes (devenue Nouvelle Alliance chez les Chrétiens). C’est pourquoi dans de nombreuses scènes de Jugement dernier le Christ est représenté assis sur ce symbole rassurant.
• Double entente. Procédé proche de la condensation. C’est le mode d’expression favori du midrash. Il demande un peu d’entraînement.
Voici quelques exercices d’assouplissement. En vous aidant des définitions du présent glossaire, dégager le sens potentiel des passages suivants :
– Lors donc que nous avons nourriture et vêtement, sachons être satisfaits (1Tm 6,8)
– La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ? (Mt 6,25)
– Une fois rassasiés, on se mit à alléger le navire en jetant le blé à la mer (Ac 27,38).
– La bonne nouvelle est annoncée aux pauvres.
– Bienheureux les pauvres en esprit, car le Royaume des Cieux est à eux.
• Beauté : la Loi, les commandements. Ainsi la reine Vashti fut répudiée (exilée) parce qu’elle refusait de montrer sa beauté aux Nations. Elle avait honte de sa Loi. Esther est choisie par le Roi à cause de sa beauté, elle ne craint pas de paraître (devant le Roi) . Joseph était beau à voir, etc.
• Royaume : période succédant à l’Exil. Exemple : Après avoir répudié Vashti, Assuérus fait accéder Esther au Royaume.
• Deux fils : il s’agit des Juifs et des païens. Ce thème concerne presque tous les personnages de la Bible (Adam, Abraham, Isaac, Joseph, etc.) Référence : Mt 21, 28: Un homme avait deux fils…
•Deux sœurs : voir entrée précédente : Exemples : Jérusalem et Samarie, Marie et Marthe.
• Unions illicites : Hérésie. Ce raccourci provient du double sens du terme nida, qui signifie d’abord impureté féminine puis, dans un sens technique : hérésie.
• ShaliaH : envoyé, mandataire, traduit en grec par apostolos d’où apôtre. Pour le judaïsme : le mandataire d’une personne est comme elle-même (sheluHo shel adam kemoto). Le shaliaH ne peut agir qu’avec le consentement de son mandant. D’où : le Fils ne peut rien faire de lui-même (Jn 5,19) je ne fais rien de moi-même (Jn 8, 28) Le Père aime le Fils et a tout remis dans sa main (Jn 3, 35) etc. shaliaH signifie aussi libre, d’où 1Co 9,1 : Ne suis-je pas libre ? Ne suis-je pas apôtre ?
• Acheter un champ : Différer la venue du messie en s’installant dans le monde. Équivaut à payer l’impôt à César. Référence principale : le champ, c’est le monde (Mt 13, 38) Hermas 50, 1:pourquoi vous procurer ainsi des champs…? Celui qui se procure ces choses dans cette cité ne s’attend donc pas à retourner dans sa propre cité.
• Vendre son champ : Accepter la venue du messie. Il faut, de plus, accepter de partager son héritage avec les païens, ce qui n’est pas toujours facile. C’est pourquoi les Juifs, dans les Évangiles, hésitent à vendre (Ac 5,3). En revanche ils sont prompts à acheter (racine qnh de la jalousie). Référence : Joseph, surnommé par les apôtres Barnabé (ce qui veut dire fils d’encouragement), lévite originaire de Chypre, possédait un champ; il le vendit, apporta l’argent et le déposa aux pieds des apôtres. (Ac 4,36-37)
• Loi de liberté : En Jc 1, 25 et 2, 12 on trouve cette expression étrange qui s’explique très simplement par un jeu de mots fréquent dans le midrash sur Harut (gravée) et Herut (liberté). À la fin des temps, la Loi actuellement gravée (qui s’impose) sera allégée (on en sera libéré)
• Tête, principe, premier : Termes attribués à Jésus à cause de leur commune référence à l’hébreu rosh (tête), reshit (commencement, principe) et qui viennent eux-mêmes du midrash juif sur la préexistence du messie.
• Corps : fondement, principe essentiel (de l’hébreu : guf, corps). Ainsi le corps de chair de Col 1, 22 pourrait bien être : l’essence de la Bonne Nouvelle (bessora)
• Espagne : Destination bien connue des fuyards. Elle était censée abriter la mystérieuse ville de Tarsis où Jonas voulut fuir. Jonas tente de fuir vers l’Espagne, mais est contraint d’aller à Ninive. Paul (de Tarse ?) tente d’aller à Tarsis, mais finira quand même à Rome, qui comme Ninive, symbolise le mal.
• Faiblesse : Attribut de Paul en tant qu’il est envoyé (verbe shalaH). La racine Halash est en effet une anagramme de ce verbe. Référence : Je me suis fait faible avec les faibles (1Co 9,22).
• Liberté : Attribut de Paul en tant qu’il est envoyé (verbe shalaH). Ce verbe signifie aussi libéré. Référence : Ne suis-je pas libre ? Ne suis-je pas apôtre ? (1Co 9,1)
• Veuve : Femme qui vient de perdre son baal (mari) et qui peut donc soit s’en trouver un autre, soit se tourner vers Dieu. Israël est présenté dans le midrash comme une veuve.
• Agrippa : Roi de Judée. Son origine iduméenne le rend non conforme à l’Écriture. C’est pourquoi les Actes multiplient les jeux de mots entre son nom (agraphos : non écrit) et l’écriture. Références : Ac 25, 26-27 : Je n’ai rien à écrire… c’est pourquoi je l’ai fait comparaître..devant toi surtout, roi Agrippa, afin qu’après cet interrogatoire, j’aie quelque chose à écrire.
• Histoire : Actualisation de schémas eschatologiques. Référence : maassé avot siman labanim. Ce qu’ont vécu les Patriarches est l’image symbolique de ce que leurs descendants vivront.
• Algèbre des qualités sensibles : disposition de l’esprit humain présente selon Claude Lévi-Strauss dans toute société, même la plus primitive comme les Bororo du Brésil, et qui est à la base de la formation des récits et des mythes. On la trouve donc aussi dans la pensée juive, où elle sert à élaborer presque toutes les entrées de ce dictionnaire (propriétés du vin et du pain quant à leur conservation, propriétés des différents arbres, fruits, saisons, etc.)
• Appel à définitions midrashiques : Ce dictionnaire est très incomplet. Si vous souhaitez le compléter, vous pouvez nous envoyer vos définitions, via ce site et nous les mettrons en ligne. La forme est la suivante: terme apparent: signifié réel, commentaire éventuel sur la raison de la double entente, référence. L’entrée Animaux est un modèle possible.
Texte extrait de l’ouvrage « Comprendre les origines du Christianisme » de Maurice MERGUI